L’hypoxie : les supers pouvoirs de la rééducation en douceur
Pionnière en France, la clinique des Lilas pratique la rééducation par hypoxie qui simule des conditions d’altitude. Cette technologie jusqu’alors dédiée à l’entrainement sportif, se révèle particulièrement efficace dans la rééducation des malades. Intéressons-nous à cette pratique innovante avec le docteur Fouad Chami, médecin coordinateur SMR chez emeis au centre de rééducation Cardio Nutritionnelle Paris Est et le Responsable Rééducateurs, Amine Chaanouni.
L’hypoxie, une affaire de globules rouges
L’hypoxie consiste à réduire l’apport en oxygène. Les patients sont exposés à un environnement pauvre en oxygène qui oblige l’organisme à s’adapter pour optimiser son efficacité. Cette adaptation stimule la production de globules rouges, améliore la capacité d’endurance et favorise une meilleure gestion de l’effort. « Les bienfaits de l’hypoxie dans l’amélioration de la circulation sanguine ne sont plus à démontrer : la surproduction des globules rouges stimule la circulation sanguine. Et c’est un excellent moyen pour aider nos patiens à récupérer mieux, plus vite et dans un meilleur confort » nous explique le docteur Chami.

La chambre à hypoxie des Lilas : une première en France
La France est très en retard par rapport à d’autres pays comme l’Allemagne, la Suisse, les Etats-Unis et le Canada où de nombreux centres existent. La plupart de nos structures de santé françaises qui s’intéressent à l’hypoxie le font principalement dans le cadre de recherches scientifiques. Le centre de rééducation cardio-nutritionnelle Paris Est se distingue en proposant l’hypoxie, non pas comme objet d’étude, mais comme solution de traitement pour les personnes cardiaques ou souffrant de troubles métaboliques de type diabète et surpoids.
« Lorsque nous nous sommes lancés dans ce projet, nous nous sommes inscrits dans une étude observationnelle, avec des procédures basées sur une batterie de biomarqueurs, nous explique le Docteur Chami. Les patients volontaires ont aussi été soumis à des tests de résistance initiale à l’effort. »
Amine Chaanouni parle d’un « grand challenge pour l’équipe des rééducateurs. » Et il poursuit : « Nous avons dû nous plonger dans des références scientifiques pour connaitre tous les bienfaits de l’approche. Ensuite, nous avons élaboré ensemble une série de protocoles. Avec le docteur Chami, nous avons travaillé un gabarit de séance que nous avons ensuite adapté au profil du patient. »

Les étapes clés d’une séance d’hypoxie
Chaque séance est soumise à un protocole écrit strict garantissant une traçabilité complète et un suivi personnalisé pour atteindre les objectifs fixés.
Chaque patient fait l’objet d’une évaluation préalable permettant d’écarter tout risque et d’adapter au mieux l’approche thérapeutique.
Amine Chaanouni rappelle les trois phases d’une séance :
- la phase d’échauffement
- la phase appelée « corps de séance » (travail respiratoire ou de renforcement musculaire selon les besoins du patient)
- la phase de retour au calme constituée d’étirements et de repos
Le suivi des mesures est assuré par une infirmière ou un membre du personnel soignant.
Une séance dure généralement entre 30 et 45 minutes, et se déroule, contrairement à un entrainement sportif par hypoxie, en situation de normobare (pression ambiante normale).

Des premiers résultats très prometteurs
Un premier groupe de six patients a été constitué. Parmi eux cinq personnes aux pathologies cardiaques diverses et une personne obèse, intentionnellement mise en situation passive. Le Docteur Chami ne cache pas son enthousiasme : « Au bout de 5 semaines, les résultats étaient spectaculaires. Certains patients ont vu leur taux de fer augmenter considérablement, sans aucune supplémentation. Une personne est passée d’une charge d’effort à 200 watts à 270 watts en gagnant 10 points sur sa fréquence cardiaque ! On en a fait un marathonien sans qu’il s’en aperçoive ! » Quant au patient atteint d’obésité, il a perdu du poids, et ce, sans le moindre effort physique.

Les contre-indications et contraintes de l’hypoxie à ce jour
Parmi les contre-indications absolues, Amine Chaanouni évoque les cardiaques sévères et les infections respiratoires graves non contrôlées.
« Si les premiers résultats sont plus qu’encourageants, nous sommes contraints à la plus grande vigilance, rappelle le Docteur Chami. Nous sommes encore en phase exploratoire ». Il se montre toutefois confiant quant à la généralisation de la pratique dans les années à venir. Certes, l’équipement d’une salle en hypoxie et la mobilisation d’une équipe pluridisciplinaire dédiée représentent un investissement conséquent. Mais, selon lui, « notre rôle de pionnier est de participer au déploiement de cette pratique et de rallier les expertises. Nous avons vocation à devenir un centre de référence qui fera bouger les lignes ». En généralisant cette approche, les patients pourraient, à terme, bénéficier d’une prise en charge, même partielle, de leur traitement.

Récapitulatif des principaux bienfaits de l’hypoxie
Le champ d’application est large. Parmi les applications de l’hypoxie en rééducation on trouve :
- La rééducation locomotrice après blessure ou chirurgie
- La réadaptation cardiaque
- La rééducation respiratoire
- La stimulation de la croissance musculaire et de la plasticité neuronale
- La récupération accélérée des tissus endommagés
- L’amélioration de la circulation sanguine
- La diminution des sensations de douleurs entrainant la réduction de prises de médicaments
Gageons que le centre de rééducation Cardio Nutritionnelle Paris Est des Lilas ne sera que le premier d'une longue liste d'établissements de rééducation à adopter l'hypoxie dans ses parcours de soin.
